Moi et le PS...

Je lui ai dit que je ne partageais pas du tout les idées de son parti et elle a quand même cherché un peu à me convaincre.
Quand j´ai commencé à énumérer les saletés qu´a pu faire le PS, elle a réagi assez vivement sur la question de l´Afrique, me disant qu´elle avait travaillé sur cette question et me proposant de me transmettre un compte-rendu de son travail.
J´ai accepté. Ce qui m´a surpris chez cette femme, c´est son énergie et surtout le fait qu´elle avait l´aire de croire à ce qu´elle dit.

Pour discuter avec elle c´était pas très facile : elle était un peu montée sur ressorts, à fond dans son sujet, alors que moi j´étais un peu dans le cirage et que j´allais prendre une douche pour me réveiller. J´étais pris au dépourvu.
J´ai donc tenu à lui faire une réponse, vu qu´elle a laissé un tract à lire.
Je fait connaître ce mail pour les gens que ca pourrait intéresser.

----------------------- Message original -----------------------

Objet: Au sujet de notre conversation pendant votre tournée

Date: Mer 13 juin 2007 15:41

À: macps@club-internet.fr

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Bonjour,

Vous êtes passée chez moi il y a quelques jours et nous avions parlé quelques minutes dans le hall. Je vous avais exposé pourquoi je ne croyais pas en votre parti ni en le système électoral républicain, mais vous sembliez stressée et tellement passionnée par votre propos que je n´ai pas vraiment eu le loisir de vous exposer mon point de vue.

Pour moi ce n´est pas Sarkozy le vrai problème, ni l´UMP, même s´il est clair que leur programme ouvre une perspective de régression sociale généralisée.
Pour moi le problème c´est le capitalisme et je ne pense pas que ce système qui fonctionne sur une illusion de liberté puisse se réformer pour donner une société basée sur l´équité.
La dérive droitière et sécuritaire a lieu au niveau mondial, touchant tous les pays, la population par l´action des groupes médiatiques et les partis politiques (dont le vôtre).
J´ai écrit une lettre à votre parti (à la rue de Solférino à Paris) il y a 10 ans, quand j´étais jeune bâchelier. J´ai relu cette lettre que je trouve aujourd´hui assez naive pour certaines choses que je reprochais à votre parti. Mais globalement mon avis n´a pas changé.

A lire votre tract on croirait qu´avec une majorité PS à l´assemblée on arriverait à l´égalité sociale ! Le ton est enlevé et trop enthousiaste pour être crédible.
Même si vous croyez à ce que vous dites (c dont je ne doute pas vraiment) et que vous souhaitez vraiment le faire vous n´y arriverez pas. Parce que vous n´êtes pas seule et que vous devrez gérer le système profondément inégalitaire qui existe déjà (mais vous êtes déjà députée européenne : je n´ai donc pas à vous l´apprendre).
Et même si vous étiez pour empêcher des grosses entreprises de licencier je ne pourrais pas vous suivre, car le fait que ces entreprises-là existent est déjà en soi un problème.
Même la Taxe Tobin (qui a fait dire à son initiateur qu´il s´étonnait qu´on la prenne aujourd´hui comme une réforme de gauche) est un "emplâtre sur une jambe de bois".

Les promesses de chiffres sur l´emploi je n´y crois pas non plus. Votre parti a déjà promis monts et merveilles à ce sujet... Et n´importe qui peut savoir que les chiffres du chômage sont truqués (des primes pour les radiations à l´ANPE en passant par les contrats bidons qui font baisser les chiffres et minimisent la réelle importance de la précarité).

La police encore et toujours. La "marée bleue" que je connais et que je vois tous les jours jusque sous mes fenêtres, celle qu´on voit tous les jours dans le centre-ville c´est celle-là. 10 ans de "Vigi-Pirate" à vivre dans un semi-état de guerre permanent avec les militaires, mitraillettes au poignet à la gare et dans certaines stations de métro. On se croirait dans un pays occupé.

Pour ce qui est de la santé, pour avoir travaillé pour Médecins du Monde, je n´en crois rien non plus. Parce que d´après mes informations la réduction du nombre de lits d´hôpitaux sévit depuis 30 ans. Je ne vois donc pas pourquoi brusquement votre parti voudrait sincèrement y changer quelque chose.

Vous êtes partie après avoir dit que je ne pourrais pas faire sans vous. Mais je sais bien qu´au fond c´est l´inverse : vous avez besoin de moi et de "nous", des voix des électeurs, pour que le parlement et les institutions donnent une impression de légitimité.

Vous avez parlé de social-démocratie, de l´exemple de votre père ou grand-père (je ne sais plus) socialiste pendant la guerre d´Espagne pour exprimer que vous étiez dans la continuité d´un combat. Ca m´a fait réfléchir.
J´ai pensé à l´exemple de la Suède dont le modèle social est souvent pris en exemple. Suède où la droite libérale arrivée au pouvoir aurait dit qu´elle n´allait rien changer : l´essentiel des secteurs privatisables ayant déjà été privatisés par les sociaux-démocrates...
Je ne pense pas qu´en tant que socialiste vous voyiez les privatisations d´un bon oeil.
Je vous disais plus haut que le capitalisme est pour moi un problème, l´exploitation de l´homme par l´homme en fait partie (et de la femme par l´homme - même si sur cette parenthèse nous pourrions peut-être tomber d´accord).
L´idée même de développement aussi et de modèle de croissance économique occidentale qui s´est fait et continue de se faire par le pillage des ressources naturelles des autres peuples, l´exploitation des classes populaires, la destruction irréversible de la nature.

Je miserais plutôt sur la décroissance, même si pour les gens de pouvoir c´est tantôt une bonne blague tantôt un cauchemar.
Pour ce qui est de la guerre d´Espagne, pour en avoir entendu parler dans mon enfance, je m´y suis intéressé à une époque. Mais je ne trouve pas quele rôle des socialistes y ait été très joli. Je parle de l´entreprise de sape de la révolution sociale (socialisation des terres et des usines, milices autogérées...) qui était mise en place et impulsée en partie par la CNT... et de la collaboration avec les communistes de Moscou.

Bon, ca c´est une vieille histoire pourriez-vous dire, sauf que pour moi
tous ces points renvoient à la question du pouvoir qui m´empêche de vous
suivre. Quand on a le pouvoir à quelques un-e-s, il est rare qu´on veuille
le lâcher, le perdre ou le partager. Et les exemples historiques souvent
sanglants ne sont pas là pour rien.

Pour ce qui est de la sécurité et des sans-papiers (des sujets qui m´affectent particulièrement) je vous demanderai qui a lancé la vague sécuritaire avant la Loi de Sécurité Quotidienne (LSQ) de la droite ?
C´était la LSI (Loi de Sécurité Intérieure) et il me semble que ca s´est mis en place sous votre parti. Quant aux charters de sans-papiers, d´après mes souvenirs ils ont été
inaugurés sous le gouvernement Cresson...

Vous aviez l´air sincère et vous avez, je vous l´ai dit, un certain courage pour venir parler aux gens chez eux. C´est pourquoi j´ai pris la peine de vous répondre alors que je tappe à un doigt et demi sur un clavier d´ordinateur.

Vous vous êtes engagée à me faire parvenir votre travail sur l´Afrique.
J´y compte toujours et je vous le rappelle au cas où vous l´auriez oublié (ce qui peut arriver quand on est aussi occupée que vous l´êtes - je dis ca sans ironie).

Je vous souhaite une bonne journée.
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PS: Entretemps j´avais recu sans le savoir 2 brochures de sa part, dont celle
dont elle parlait sous forme de lettre d´information de député-e.