Le fondeur de canons (Gaston Couté)
Encore un texte fort de Gaston Couté où l'ironie se mélange aux idées internationalistes. Un poème contre la guerre et le militarisme, écrit du point de vue d'un travailleur qui pour pouvoir satisfaire ses intérêts à court terme (manger) travaille contre ses intérêts sur le long terme (il fabrique des armes). La menace de guerre sous nos horizons est passée de mode, pourtant cette chanson rappelle tous ceux qui aujourd'hui encore travaillent contre leurs intérêts et ceux des autres pour pouvoir vivre (dans l'armement toujours, mais aussi dans le nucléaire, les pesticides, pourquoi pas les labos pharmaceutiques, sans oublier l'armée ou la police).
Le fondeur de canons
Je suis un pauvre travailleur
Pas plus méchant que tous les autres,
Et je suis peut-être meilleur
O patrons ! que beaucoup des vôtres ;
Mais c'est mon métier qui veut ça,
Et ce n'est pas ma faute, en somme,
Si j'use chaque jour mes bras
A préparer la mort des hommes...
-Refrain (1)-
Pour gagner mon pain
Je fonds des canons qui tueront demain
Si la guerre arrive.
Que voulez-vous, faut ben qu'on vive !
Je fais des outils de trépas
Et des instruments à blessures
Comme un tisserand fait des draps
Et le cordonnier des chaussures,
En fredonnant une chanson (2)
Où l'on aime toujours sa blonde ;
Mieux vaut ça qu'être un vagabond
Qui tend la main à tout le monde.
Et puis je suis aussi de ceux
Qui partiront pour les frontières
Lorsque rougira dans les cieux
L'aurore des prochaines guerres ;
Là-bas, aux canons ennemis
Qui seront les vôtres, mes frères !
Il faudra que j'expose aussi
Ma poitrine d'homme et de père.
Ne va pas me maudire, ô toi
Qui dormiras, un jour, peut-être,
Ton dernier somme auprès de moi
Dans la plaine où les bœufs vont paître !
Vous dont les petits grandiront
Ne me maudissez pas, ô mères !
Moi je ne fais que des canons,
Ça n'est pas moi qui les fais faire !
Gaston Couté
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Notes :
(1) Variante chantée par Marc Robine :
Pour gagner mon pain je fais des canons,
Je fais des canons qui tueront demain
Qui tueront demain si la guerre arrive
Si la guerre arrive il faut bien vivre !
(2) Demi-strophe supprimée par Marc Robine.