jean Ferrat : quelques hommages (collectés sur divers sites)

Publié le par Mako

HUGUES AUFRAY :

 «Jean Ferrat et moi sommes de la même génération: celle de Nougaro, Moustaki, Brel… Maintenant, j’entends dire n’importe quoi. On a joué aux fêtes du Parti des années 60, chanté la solidarité, la fraternité, la paix, mais on n’était pas "engagés". On n’a jamais été inquiétés par le pouvoir, jamais vécu dans la dictature. Il n’avait pas sa carte et contrairement à ce qu’on dit, n’a jamais été interdit de télévision; toujours bienvenue chez Michel Drucker. Ce qui nous sépare, c’est qu’il chantait pour le Parti, moi pour le peuple; lui plutôt Sartre, moi Camus.»

 

GEORGES MOUSTAKI :

«J’aimais Jean. Nous étions différents et proches. Il prenait les choses très au sérieux, fustigeait les cons de 1968, et moi, l’anar soixante-huitard, je n’étais pas d’accord. Je le voyais beaucoup ces temps-ci, notre maladie commune nous a réunis.»

 

FRANCESCA SOLLEVILLE :

 «C’est lui qui m’a donné envie de chanter. Pour avoir été son amie jusqu’aux derniers temps en voisins, je peux témoigner que c’était un homme honnête. Au lieu d’aller chercher l’identité nationale dans les livres, réécoutons sa chanson Ma France, où il parle de Victor Hugo et Robespierre.»

 

OLIVIER BESANCENOT :

 «C’est quelqu’un qui a compté dans mon parcours militant. Je l’ai appelé en 1991, au moment de son disque Dans la jungle ou dans le zoo. C’était au lendemain de la chute du Mur de Berlin et de l’effondrement du bloc soviétique, et la chanson-titre disait que ce n’était pas nécessairement "la jungle ou le zoo", qu’on avait le droit de rêver à une autre société. L’anticapitaliste que je suis a le sentiment de perdre un camarade, en plus du poète qu’il était.»

 

JACK RALITE :

«C’était un grand débatteur. Je garde le souvenir de toutes nos réunions ensemble sur la culture. Celle de 2003 sur le Larzac, l’arrêt du Festival d’Avignon, au Zénith avec Antoine Vitez, Claude Santelli, Bernard Noël, en novembre 1987 sur le thème "Un peuple qui abandonne son imaginaire se condamne à des libertés précaires". Il était très concerné par la loi Hadopi, le droit d’auteurs à la Sacem, avec précision, mesure mais radicalité. C’était un homme fidèle capable d’infidélité s’il s’agissait du combat pour la liberté et la dignité. Il aimait la vie à perdre la raison, comme il le chante. Il s’est toujours souvenu de l’avenir, toujours mobilisable et mobilisé.»

 

GUY BEART :

 «J’aurais aimé qu’il vive plus longtemps. Nous étions amis depuis nos débuts, à la Colombe du Quartier Latin, à l’Alhambra. Il m’impressionnait par sa voix de violoncelle. Je lui disais de faire un disque pour discothèque, comme Ferré avec C’est extra. J’aimais sa sincérité, ses mélodies d’amour sur Aragon, comme ses chansons de combat. C’était un mélancolique, joyeux que quand il avait bu.»

 

EDMONDE-CHARLES-ROUX, écrivain, membre de l’Académie Goncourt :

"Jean va laisser un vide immense. Il était un poète, “le” poète. Il avait poussé à l’extrême, dans son désir de perfection, la transcription du poème en musique et de la musique en poème. La manière dont le texte collait aux notes, c’était vraiment magique. Nous avons perdu un alchimiste, un magicien et un grand seigneur. Le Parti communiste a pu profiter des conseils, des avis, des critiques de Jean, et y a gagné en intelligence. C’est cela une vie d’engagement au sens noble du terme. Jean reste unique, il n’a pas eu le traitement auquel il avait le droit, on n’entendait plus sa voix. Est-ce que nous, les Français, avons le respect de nos poètes. Je ne le crois pas et le déplore. Il ne rentrait pas dans le moule. Mais il a trouvé la quiétude en se retirant avant que sa voix ne décline, il a fait ce que très peu d’artistes ont le courage de réaliser : s’arrêter quand il l’a jugé opportun. Et cela demande du courage et de l’élégance. Il était si modeste, si pudique."


JEAN RISTAT, exécuteur testamentaire de Louis Aragon et Elsa Triolet :

"Jean Ferrat était un homme d’une grande gentillesse, extrêmement attentif aux autres, tendre, modeste. Il était très intimidé par la stature de grand poète, mais en même temps Aragon avait l’art de se mettre à la hauteur des autres. Jean Ferrat avait des conversations techniques avec Aragon sur la manière de mettre en musique ses poèmes, quel titre donner, quels verbes enlever… Il y avait une certaine complicité entre eux. Aragon a toujours eu une attitude ambivalente avec ceux qui mettaient en musique ses poèmes: il était très heureux, la “lecture d’oreille”, comme disait Aragon, le séduisait. Mais le poète qu’il était ne pouvait que garder une distance, on traduisait ses vers par la voix et la musique. Jean aimait profondément l’oeuvre d’Aragon. Il a fait un disque entier d’après Aragon, dans lequel il a notamment chanté L’Epilogue. C’est un des plus beaux poèmes d’Aragon, son testament. Ferrat a considéré qu’il y avait des légères boiteries sur les vers de ce poème, l’épreuve de la musique est une épreuve impitoyable!"

 

JOSE BOVE :

"Le plus beau souvenir que je garde de Jean, c’est au rassemblement du Larzac en 2003, juste après ma libération. Il est venu participer à ce week-end de débats alors que cela tombait en même temps que le repas républicain d’Entraigues. Il m’avait dit : “Cette année, ce repas se tiendra sur le Larzac.” Les vieux paysans du Larzac étaient émus de le rencontrer, c’est une voix pour eux qui incarnait leur combat, leur quotidien, une vraie fraternité. Jean Ferrat était une passerelle entre la chanson populaire et la poésie. La Montagne est la chanson qui me parle le plus, une extraordinaire description du monde rural, de l’exode. Il était un altermondialiste avant l’heure."


ROBERT HUE,  ancien secrétaire national du PCF:

"Il a chanté la France, la vie des petites gens comme personne. Je l’ai rencontré pour la première fois lorsque je suis devenu dirigeant communiste dans les années1990. Une de mes émotions les plus grandes fut le jour où il a accepté de figurer sur ma liste aux européennes de juin 1999. C’est l’unique fois où il a été candidat. Il avait accepté à condition d’être dans les dernières places. Il partageait cette dernière place avec Maurice Kriegel-Valrimont, un grand résistant, exclu du PC.Jean Ferrat est pour les communistes une grande part de leur identité. Une chanson pour moi est essentielle, celle consacrée aux relents du stalinisme, Camarades : “Camarades que venez vous faire à Prague”, cette chanson contre l’invasion soviétique en Tchécoslovaquie en 1968 est pour moi éternelle."


JULIETTE GRECO :

"Je suis certaine d’une chose, Jean ne va pas être content, car il ne pourra voter demain. Je suis aussi très fâchée et mécontente. Il aurait pu ne pas partir si vite. J’aurais voulu le garder encore. La disparition d’un être humain aussi vivant, sincère et pur, c’est un événement dommageable, et pas seulement pour la chanson. Jean était un être généreux dans le sens noble du terme. Il n’a jamais rien pris à personne, il a tout donné à tout le monde. Jean Ferrat chantait comme on s’insurge. Il était un homme de conviction, mais un homme libre. Un compagnon de route du PC, qui a toujours eu le courage de dénoncer les dérives de l’Union soviétique et de tout système totalitaire. Quand je l’ai rencontré pour la première fois, nous étions très jeunes. Il en était à ses débuts et les miens n’étaient pas loin. Il était beau, rayonnant, fort, avec cette voix magnifique. Il était un homme debout, un combattant, un homme de bien, il avait foi en l’autre."

 

ISABELLE AUBRET :

"Le public, la poésie et la chanson viennent de perdre un homme précieux. Et moi, je perds un ami, un ami de cinquante ans. Il était très fatigué ces derniers temps… Je suis submergée par l’émotion et la tristesse, mais je vais continuer à chanter, je sais qu’il serait content que je sois là, face au public, comme sa “petite messagère”."


PIERRE PERRET :

"Jean était un frère de galère. Nous nous sommes connus au cabaret La Colombe, lors de nos premiers balbutiements en chanson, il chantait Ma Môme. Il m’a tout de suite touché. Nous nous produisions aussi dans un restaurant de la rue Jacob, la Rôtisserie de l’Abbaye. Nous transpirions comme des veaux dans ce lieu où l’on venait avant tout pour manger et non pour écouter des chanteurs. Jean ressortait de là effondré à chaque fois, et me disait “demain je ne reviens pas”, mais il revenait toujours, parce qu’il fallait becter. Après s’être retiré à Antraigues, il m’a invité à faire un concert pour la fête de son village. Il m’a présenté son fournisseur de truffes, il m’a montré les coins où il pêchait des écrevisses. Cette vie lui correspondait parfaitement. Dans le métier, il n’était pas vraiment à l’aise, il était un vrai poète, réfractaire à ce système, un peu sauvage. Il regrettait de n’avoir pu mettre dans ses chansons plus d’humour, de lumière, il aimait tellement rire."

 

NICOLAS SARKOZY (président de la République, au cas où qulqu'un aurait oublié) :

"Avec Jean Ferrat, c’est une conception intransigeante de la chanson française qui s’éteint."

 

MARTINE AUBRY, première secrétaire du PS:

"Chacune des chansons de Jean Ferrat était un hymne à la résistance."

 

FREDERIC MITTERRAND, ministre de la Culture:

"Nuit et Brouillard, Potemkine, Camarade, Ma Môme ou encore La Montagne, c’est cela Ferrat, ce mélange d’engagement politique, de fraternité et d’amour.

C'est curieux que les politiques au pouvoir ne parlent pas de "Ma France"... Apparemment elle est toujours indésirable dans les médias. De ce que j'ai pu voir par internet d'hommages qui lui ont été consacrés, on aurait encore tendance à la cacher. Pourtant elle parle d"'identité nationale", non ? Enfin, peut-être que sa vision de la France ne colle pas tellement avec celle de Sarkozy et ses associés pleins aux as...


 

Publié dans Sortie des artistes

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